Mémoire

MANO Marcel

Né le 5 décembre 1919 à Villegouge (Gironde) Disparu en déportation le 13 mars 1945, probablement à Mauthausen (Autriche). Fils du cheminot François Mano et de Jeanne Casenove, après avoir été employé à la Compagnie de Saint-Gobain, Marcel (Jean) Mano entre au chemin de fer comme auxiliaire à Chantenay (Loire-Inférieure). Lorsque survient le second conflit […]

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MANO Marcel

Né le 5 décembre 1919 à Villegouge (Gironde)
Disparu en déportation le 13 mars 1945, probablement à Mauthausen (Autriche).

Fils du cheminot François Mano et de Jeanne Casenove, après avoir été employé à la Compagnie de Saint-Gobain, Marcel (Jean) Mano entre au chemin de fer comme auxiliaire à Chantenay (Loire-Inférieure). Lorsque survient le second conflit mondial, il réside rue du Petit-Joseph, à Nantes.

Rapidement, il s’engage avec ses frères, René et Raoul, dans l’organisation de résistance communiste Front national. À l’été 1942, les actions de plusieurs groupes s’enchaînent. Dans la nuit du 26 au 27 juillet 1942, un nombre considérable de feuilles et de cartes d’alimentation sont dérobées à la mairie de Saint-Sébastien-sur-Loire.

Le préfet de Loire-Inférieure prie alors Charles Detmar, chef du SPAC [le service de police anticommuniste], d’envoyer à Nantes le commissaire Lafouge pour mener l’enquête. Le service décide d’opérer des perquisitions chez des membres des Jeunesses communistes de Nantes susceptibles d’être encore en activité. Ils tombent ainsi le 31 juillet 1942 sur René Hénaff, un résistant du réseau Nantes-Nord qui est obligé de donner le nom de Marcel Mano comme étant un des destinataires des sommes d’argent récoltées et comme celui qui lui fournissait les tracts à diffuser.

À la suite de ces révélations, celui-ci est arrêté le jour même à son domicile par le SPAC d’Angers. Ses frères, Raoul et René, sont également interpellés. Les militants tombent les uns après les autres, au point que, le 25 août 1942, devant « l’extension des opérations », le commissaire Lafouge demande des renforts. Le 8 août, le juge d’instruction Le Bras délivre un mandat de dépôt contre Marcel Mano. D’abord interné à la prison Lafayette de Nantes, il passe ensuite par celle d’Angers le 21 août, puis revient à Nantes le 9 novembre avant d’être incarcéré le 10 février 1943 à la maison d’arrêt de Vitré (Ille-et-Vilaine) en vue de son procès qui doit s’ouvrir le lendemain.

Le 11 février, ils sont 21 à être extraits de leurs cellules pour comparaître devant la section spéciale de la cour d’appel de Rennes pour « activité communiste ». Le tribunal prononce deux relaxes et des peines allant d’un an de prison à sept ans de travaux forcés. Si Raoul Mano est condamné à un an de prison et 1 200 F d’amende, Marcel et René le sont à deux années de plus. Le chef du secteur nord de Nantes, Marcel Thomazeau, est condamné à sept ans de travaux forcés. Transféré à la maison centrale de Fontevrault (n° d’écrou 6589) le 17 septembre 1943, Marcel Mano est ensuite envoyé avec 139 camarades à la nouvelle prison de Blois (n° 84), qui est destinée à regrouper les prévenus condamnés pour des faits en lien avec l’activité terroriste et communiste afin de faciliter leur surveillance.

Le 18 février 1944, il est livré aux Allemands avec l’ensemble des détenus communistes de Blois et envoyé à Compiègne-Royallieu (n° 27888). Le 22 mars 1944, il est déporté à Mauthausen avec plus de 1 200 hommes, parmi lesquels se trouvent ses compagnons de résistance et de détention, mais aussi son frère René, alors que Raoul était parti le 16 septembre 1943 pour Buchenwald. Il arrive au camp après trois jours de voyage dans un wagon de marchandises et reçoit le matricule 60229. Enregistré comme menuisier (Tischler), il est employé comme tel au Kommando de Gusen, qu’il rejoint le 28 avril 1944 dans un convoi de 300 détenus destinés à travailler au projet Esche II, nom de code dissimulant une production d’armements à Gusen II. Très affaibli, il est admis à plusieurs reprises au Revier [infirmerie], entre le 9 septembre 1944 et le 13 mars 1945, date à laquelle il est reconduit à Mauthausen, où il entre immédiatement à l’infirmerie.

Joseph Lebreton et René Mano, qui ne l’avaient pas quitté depuis Fontevrault, indiquent ne plus avoir eu de ses nouvelles après son départ de Gusen le 13 mars 1945. Il a sans doute survécu plus d’un mois à son retour au camp central, les décès de détenus ayant été scrupuleusement enregistrés jusque dans les derniers jours ayant précédé la libération du site. Il a peut-être vu arriver l’armée américaine le 5 mai 1945, mais on perd ensuite sa trace. Ses deux frères sont rentrés en France en 1945.

Reconnu « Mort pour la France », le 13 août 1964, il a obtenu le titre de Déporté résistant, qui lui avait été d’abord refusé le 22 septembre 1955. Son nom figure sur le monument de la gare de Nantes.

Adeline Lee

Photo : Marcel Mano. Photo anthropométrique. Service historique de la Défense, division des Archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC).

Sources : SHD DAVCC, 21 P 512071, LA 7113, 6808, MA 16/2, 26 P 1132 (copie du registre original du camp de Mauthausen), 26 P 2272 (Häftling Personalkarte) ; AD Loir-et-Cher, 1375 W 61, W 34, W 119, W 95 ; RM (informations de Carlos Fernandez) ; CGC ; FMD.

Extrait de l’ouvrage Les Cheminots victimes de la répression, 1940-1945. Livre mémorial (Paris, Perrin/Rails et histoire/SNCF, 2017).

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