Mémoire

Madeleine Verly, assistante sociale à la SNCF et résistante

À l’occasion des expositions « Cheminots dans la Résistance » et « 1944-2024 : 80 ans de la Libération de Paris », à voir gare Montparnasse du 15 mai au 30 août 2024, retour sur l’histoire engagée de Madeleine Verly, assistante sociale à la SNCF et résistante. Madeleine Verly est née en 1897 dans le Calvados, à Feuguerolles-sur-Seulles. Elle […]

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À l’occasion des expositions « Cheminots dans la Résistance » et « 1944-2024 : 80 ans de la Libération de Paris », à voir gare Montparnasse du 15 mai au 30 août 2024, retour sur l’histoire engagée de Madeleine Verly, assistante sociale à la SNCF et résistante.

Madeleine Verly est née en 1897 dans le Calvados, à Feuguerolles-sur-Seulles. Elle rejoint le service social du réseau de l’État en Basse-Normandie en 1931 après des études d’infirmière et de visiteuse sociale. Créé en 1922, le titre de visiteuse d’hygiène est fusionné avec celui d’assistante sociale en 1938. Les infirmières-visiteuses d’hygiène sont à l’époque en première ligne dans la lutte contre les fléaux sociaux, en particulier la tuberculose et le manque d’hygiène infantile. Madeleine Verly rejoint donc le service social de la gare de Caen, où travaille déjà une autre assistante arrivée quelques mois plus tôt, Lucienne Kaffin.  

 

Photographie de Madeleine Verly, Archives départementales du Calvados, Fonds Madeleine Verly, 6J/89.

En 1940, la Normandie est occupée. Madeleine Verly a 43 ans et exerce son métier d’assistante sociale auprès des cheminots en gare de Caen. Elle choisit très vite de s’engager dans la résistance et intègre rapidement un réseau de renseignement sous le pseudonyme de Valentine. Dans un témoignage conservé au Mémorial de Caen elle évoque son patriotisme comme l’élément déclencheur de son engagement. Son métier et son brassard SNCF lui permettent de se déplacer dans la Manche et le Calvados et de se renseigner sur l’état des forces allemandes, en vue du débarquement allié qui intervient le 6 juin 1944.  

Madeleine Verly fait partie du réseau franco-polonais F2, de Résistance Fer (NAP Fer) puis du réseau Sanson. Rattachée aux Forces françaises combattantes, dirigées depuis Londres, elle est aussi en lien avec le chef de gare de Caen, Albert Augé, qui s’appuie sur plus de 2 000 cheminots du dépôt de locomotives, actifs dans la Résistance locale et dans les sabotages du matériel ferroviaire. Elle mène des missions d’information et de coordination. En lien avec un ouvrier de l’arsenal qui lui fournit l’état des stocks d’hydrocarbures et les mouvements des navires ennemis, elle fournit des plans et renseignements hebdomadaires sur les activités du port et de l’arsenal de Cherbourg ainsi que sur la défense côtière de toute la Manche. Elle fournit également des papiers à des réfractaires du Service du travail obligatoire, organise des caches pour certains, transmet des messages aux résistants emprisonnés à Caen et participe à la distribution de la presse clandestine. 

Carte d’adhérente à Résistance Fer de Madeleine Verly, Archives départementales du Calvados, Fonds Madeleine Verly, 6J/89

Dès la fin de l’été 1942, Madeleine Verly s’engage dans des missions plus risquées : communiquer aux Anglais les horaires du train de Rommel, commandant des forces allemandes, ou encore récupérer les plans du radar de Barneville qui régissait le trafic maritime de Brest, ce qui aurait contribué à la destruction du cuirassé allemand le Tirpitz, le 12 novembre 1944. Elle participe également à des sabotages comme celui d’un tunnel près de Honfleur.  

 Parallèlement à son rôle dans les réseaux clandestins, elle continue à exercer son métier et, dès la fin 1943, assure clandestinement la mission de service social auprès des familles de résistants arrêtés. En 1944, elle crée le Comité des œuvres sociales de la Résistance (COSOR) pour le Calvados qui vient en aide aux familles des résistants incarcérés, fusillés ou déportés.  

Lucienne Kaffin, dont Madeleine Verly est l’adjointe, poursuit de son côté son travail d’assistante sociale, et notamment son action en faveur des enfants des prisonniers et déportés.

Après le Débarquement, la bataille de Normandie plonge la population civile au cœur des combats et des bombardements. La maison de Lucienne Kaffin est détruite lors des premiers bombardements de juin 1944. Elle choisit malgré tout, comme Madeleine Verly, de rester à son poste “quoi qu’il arrive”, pour soutenir et visiter les familles des victimes. Cet épisode est retracé par Lucienne Kaffin dans son “Rapport de la bataille de Caen”, où elle décrit minutieusement bombardements, combats, destructions, morts et blessés et leurs actions de secours. Elle mentionne aussi l’engagement de Madeleine Verly dans la résistance et leur travail commun au sein du service social. 

 

L’Entr’aide Cheminote, n°10 (janvier-février 1946), Archives de la SNCF – SARDO, centre des archives historiques du Mans,  VDR 145

À la Libération, Madeleine Verly poursuit au grand jour son engagement dans le COSOR et, en 1945, elle est une des premières adhérentes de l’Association nationale des Assistantes sociales (Anas). Le 30 mars 1945, elle est citée à l’ordre du régiment par le général de Gaulle, et décrite comme “une jeune femme d’un courage et d’un dévouement exemplaires qui fournit des renseignements très précieux sur les défenses d’une portion d’un secteur côtier”. 

 

Carte de lieutenant des FFI de Madeleine Verly reconnaissant son action, Archives départementales du Calvados, Fonds Madeleine Verly, 6J/89.

En décembre 2023, la ville de Caen choisit de rebaptiser plusieurs rues afin de commencer à féminiser l’espace public. Une allée piétonne du quartier Sainte-Thérèse est ainsi rebaptisée Madeleine Verly, avec la volonté d’honorer le parcours de cette femme qui s’est illustrée dans la résistance à Caen où elle est morte en 1995.

Remerciements à Laurent Thévenet, historien, auteur de la biographie de M. Verly, et à Adèle Delaune, Archives départementales du Calvados

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